La solution fut trouvée à l'intérieur même du pays. Le ministre de la Défense nationale, le général Wojciech Jaruzelski se révèle comme l'homme de la situation. Le 13 février 1981, il devint Premier Ministre. Il demande à la Diète de collaborer avec Solidarnosc, et le 10 mars 1981, il rencontre Lech Walesa. Il semble s'être situé entre les partisans du " renouveau ", honnis par l'URSS, et ceux de la " normalisation " par la force, qui affectaient de voir dans le vaste mouvement polonais un simple complot sioniste.

    L'année 1981 fut celle de l'effervescence. D'un côté, un vaste mouvement de libération, avec ses manifestations, ses grèves, son enthousiasme tempéré par l'attitude hostile de la presse soviétique. De l'autre, pénurie, hausse des prix, désordre, dialogue de sourds entre Solidarnosc et le gouvernement, qui atteint son apogée entre juillet et septembre 1981 avec l'élection de Walesa comme président de Solidarnosc lors d'un congrès national du syndicat (Walesa obtient 58,2 % des voix). L'Eglise prêchant, certes la modération, le permet. Le cardinal Wyszynski meurt le 28 mai 1981 et comme successeur le cardinal Glemb, à qui la pourpre vient d'être conférée.

    La décision a été prise en décembre 1980, alors que cinq cent mille soldats du Pacte de Varsovie se tiennent en alerte aux frontières de la Pologne. Elle est appliquée, le 13 décembre 1981. Le général Jaruzelski, " l'homme aux lunettes noires" - qui cumule depuis octobre la présidence du Parti et du gouvernement ainsi que la responsabilité de la défense - constate que " le chaos et la démoralisation ont pris les dimensions d'une catastrophe nationale ". L'effet de surprise joue à plein (même si il a été prouvé que les Américains, sans broncher, avaient été mis au courant par Jaruzelski de l'affaire quelques semaines auparavant): " l'Etat de Guerre" ( "Stan Wojenny") est proclamé, le syndicat Solidarnosc est dissous; dix mille cadres et militants sont internés; la surveillance policière est omniprésente; la Pologne est isolée du reste du monde.